Bibliographie
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Matériaux
Ad-hoc-Kommission Schaden UVG, Empfehlungen zur Anwendung von UVG und UVV Nr. 5/83 Wagnisse vom 10. Oktober 1983, Totalrevision vom 16. Juni 2010, angepasst per 18. November 2016 und 27. Juni 2018; Beratungsstelle für Unfallverhütung – bfu, Fachbroschüre Kletteranlagen, 2015; Botschaft zu einem Bundesgesetz über Fuss- und Wanderwege (FWG) vom 26. September 1983, BBl 1983 IV S. 1 ff.; Bundesamt für Sport BASPO, Sportklettern Ausbildungsstruktur vom 26. Oktober 2017; Re-Bolting Verein für nachhaltiges sanieren und einrichten von Kletterrouten; SAC-Richtlinien Umwelt und Raumentwicklung, Bern 2017.
I. Introduction
Les personnes qui pratiquent l'escalade en falaise veulent être dans la nature, faire du sport, tester leurs limites. Même si les grimpeurs/euses partent du principe qu'ils ne seront pas touchés, des éboulements, des défauts de matériel, des erreurs d'assurage ou, plus généralement, des erreurs de manipulation des cordes peuvent entraîner des accidents. Qui est responsable si un accident entraîne des blessures, voire la mort ? La responsabilité incombe-t-elle uniquement à la personne qui assure ou, le cas échéant, la personne qui a équipé la voie parce que le spit a été mal placé ? Un accident coûte alors rapidement plusieurs dizaines de milliers de francs : hôpital, réhabilitation, arrêt de travail, etc. Les assurances voudront également avoir leur mot à dire : a-t-on pris un risque trop élevé ou évitable ? La montagne n'est plus considérée comme un vide juridique, comme cela a été le cas dans le passé.
II. Généralités
Les personnes qui pratiquent l'escalade en falaise s'engagent généralement dans des voies d'escalade, des jardins d'escalade ou des via ferrata. Avant d'aborder les questions de responsabilité, il convient de clarifier quelques aspects fondamentaux tels que la terminologie et les questions relatives à l'ouverture et le rééquipement des voies.
A. Définition
Une voie d'escalade décrit la voie prédéfini pour l'ascension d'un sommet ou d'une paroi rocheuse. Une voie d'escalade est donc quasiment un chemin de randonnée pédestre vertical. Elle n'entre toutefois pas dans le champ d'application de la loi fédérale sur les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre (cf. art. 2 et 3 LCPR et FF 1983 IV 8).
Le terme générique de voie d'escalade englobe les types de voies les plus divers : entre autres les voies d'escalade alpine, les voies d'escalade sportive, les jardins d'escalade ou les via ferrata (cf. la présentation détaillée dans Feser/Lustenberger, p. 7 s. ; Müller, Haftungsfragen, n. 113).
1. Jardin d'escalade/voies d'escalade sportive
Un jardin d'escalade se compose d'une multitude de voies d'escalade sportive. Il s'agit le plus souvent de voies d'une longueur qui peuvent aussi être escaladées en toprope (style d'escalade dans lequel la corde traverse le support de sorte qu'aucun dispositif de sécurité ne doit être fixé pendant l'escalade; le/la grimpeur/euse peut s’arrêter à tout moment et se faire tenir par la corde ou se laisser redescendre en rappel par son/sa partenaire d'assurage). Les jardins d'escalade se trouvent en général sur des terrains facilement accessibles (Feser/Lustenberger, p. 7).
Dans les jardins d'escalade, on peut faire la distinction entre les jardins d'escalade aménagés et les jardins d'escalade développés. Dans les premiers, l'ensemble du site ou des secteurs est aménagé de manière planifiée et systématique. Un jardin d'escalade développé, par contre, se construit au fil du temps par l'ajout successif de nouvelles voies (Feser/Lustenberger, p. 7 ; Müller, Kletterausflug, p. 102).
Dans les guides d'escalade, sur les sites Internet ou parfois directement sur le rocher la difficulté des voies est cotée. Il s'agit en principe de définir la difficulté d'une voie afin de pouvoir la classer par rapport à d'autres voies. La pertinence de ces évaluations est toutefois limitée et sert davantage d'orientation, car de nombreux facteurs jouent un rôle qui ne peut être pris en compte que de manière limitée : Inclinaison de la paroi, taille et nombre de prises et de prises de pied possibles, nature du rocher, orientation, état et caractère (cf. les différentes échelles d'escalade et leur correspondance : https://www.bergfreunde.de/out/pictures/wysiwigpro/kalkulatoren/pdf/kletterskalen-vergleich-tabelle.pdf, https://www.sac-cas.ch/fileadmin/Ausbildung_und_Wissen/Tourenplanung/Schwierigkeitsskala/Kletterskala-UIAA.pdf, niveaux de difficulté escalade (kletterportal.ch)). En Suisse, l'échelle française est la plus utilisée. Les degrés de difficulté peuvent être grossièrement divisés en voies pour débutants (1-3c+), pour avancés (4a-6a), pour expérimentés (6a+-7a+) et pour experts (7b-9c).
2. Escalade alpine/voies de plusieurs longueurs
L'escalade alpine ou l'escalade de plusieurs longueurs est une sous-forme d'escalade dont l'objectif est souvent d'atteindre le sommet de la montagne. Il s'agit d'escalader des parois rocheuses ou des piliers de plusieurs longueurs. Les voies d'escalade alpine sont souvent moins bien sécurisées que les voies d'escalade sportive, de sorte que des assurages en rocher supplémentaires peuvent être nécessaires en plus des pitons existants (Feser/Lustenberger, p. 7 et Müller, Haftungsfragen, n. 142).
Les voies de de plusieurs longueurs sont évaluées avec les mêmes échelles d'escalade que les voies d'escalade sportive. Dans certaines régions, on trouve aussi des indications de difficulté pour la maîtrise technique d'un passage. C'est une forme d'escalade dans laquelle des aides techniques telles que des crochets sont utilisées non seulement pour sécuriser mais aussi pour la progression (progression avec des dégaines, des échelles, utilisation de dégaines express comme prises, etc. ; voir à ce sujet https://de.wikipedia.org/wiki/Schwierigkeitsskala_(Klettern)#Technisches_Klettern ; https://www.alpenverein-freistadt.at/UIAASkala.htm).
3. Via ferrata
La via ferrata est un itinéraire aménagé dans une paroi rocheuse, équipé avec des éléments métalliques spécifiques (câbles, échelles, rampes, etc.) destinés à faciliter la progression. La sécurité est optimale grâce à une ligne de vie (main courante) qui permet l'auto-assurage des pratiquants.. De plus, plusieurs personnes peuvent grimper en même temps sur un même itinéraire. Selon la difficulté, il n'est pas ou peu nécessaire d'avoir de l'expérience en escalade pour emprunter une via ferrata (Müller, Haftungsfragen, n. 143 ; Müller, Kletterausflug, p. 102 ; Winkler/Brehm/Kaltmeier, p. 128).
Il existe également des échelles d'évaluation pour les via ferrata, dans lesquelles le terrain, la sécurité, les capacités et l'équipement sont pris en compte (cf. https://www.berg-freunde.ch/klettersteig-schwierigkeitsgrade-rechner/, https://www.sac-cas.ch/fileadmin/Ausbildung_und_Wissen/Tourenplanung/Schwierigkeitsskala/Klettersteigskala-SAC.pdf). La catégorisation la plus courante en Suisse est "l'échelle de Hüsler" et va de K1 (facile) à K6 (extrêmement difficile).
4. Les professeur-e-s d'escalade.
Les professeur-e-s d'escalade titulaires d'un brevet fédéral enseignent l'escalade aux enfants, adolescents et adultes. En plein air sur le rocher ou dans les salle d'escalade, ils enseignent à leur clients les techniques d’escalade, la manipulation des cordes ainsi que l’utilisation du matériel spécifique et les risques. Les qualifications requises pour l'examen s'acquièrent dans différents modules (cf. Christen, p. 269 ; https://sbv-asgm.ch/kletterlehrer-kletterlehrerin/#toggle-id-8). Pour être admis à la formation de professeur-e- d'escalade, il faut notamment avoir suivi une formation J&S Escalade sportive jusqu'au module "Admission WB2" inclus (cf. à ce sujet Office fédéral du sport, p. 2 s.). La formation de professeur-e- d'escalade est complète. En réussissant l'examen professionnel, les professeur-e-s d'escalade donnent des cours collectifs et individuels à différents niveaux d'habilité (indoor, outdoor, escalade à plusieurs longueurs, etc. ; cf. également https://sbv-asgm.ch/wp-content/uploads/Kletterlehrerausbildung-Schema_Vers._2022.pdf ; pour la délimitation par rapport aux guides de montagne, voir Kuonen, n. 23 ss).
B. Équipement de voies d'escalade
Autrefois, l'équipement d'une voie d'escalade, la "première ascension", était un acte de pionnier. Seuls les meilleurs et les plus courageux s'aventuraient sur des parois non escaladées. A la fin des années 70, l'escalade est devenue sportive et le focus de l'escalade a changé. Ce n'est pas le sommet de la montagne qui attirait les grimpeurs/euses, mais la difficulté de l'escalade en tant que telle. Dans les années 90, l'escalade plaisir - l'escalade dans des voies bien sécurisées de difficulté faible à moyenne - a rendu l'escalade accessible au plus grand nombre. Comme dans l'escalade extrême - escalade de difficulté moyenne et élevée - les grimpeurs/euses plaisirs sont soucieux d'être dans la nature et de repousser leurs limites. Ils/elles acquièrent toutefois leur expérience dans des voies plus faciles et bien assuré-e-s afin d'améliorer leur technique d'escalade (pour plus de détails, voir von Känel, p. 1 ss ; ainsi que Feser/Lustenberger, p. 8).
Outre l'escalade classique, un véritable "engouement" pour les via ferrata a vu le jour ces dernières années. Dans l'espace alpin, il existe plus de 1000 via ferrata, et chaque année, de nouvelles s'y ajoutent (Szépfalusi, p. 14). Les via ferrata sont souvent créées dans le but d'offrir un défi aux touristes sportifs/ves de la montagne. Les initiateurs sont souvent des associations touristiques locales ou des sociétés de remontées mécaniques (Szépfalusi, p. 14 ; Werner/Kürschner/Huttelochker/Hemmleb, p. 13, 22).
Le développement de l'escalade a entraîné l'aménagement de nombreuses voies d'escalade, de jardins d'escalade et de via ferrata. Cela a également donné lieu à un discours de fond concernant l'ouverture de voies, la rénovation et la sécurité.
1. Droit à équiper une
a. Voies d'escalade
Les voies d'escalade sont généralement aménagées par des particuliers ou des associations en perçant, en planter des spits enfonçant ou en enfoncer la broche. Selon la voie, des emplacements et des points de descente en rappel s'y ajoutent. Cela constitue une atteinte à la propriété foncière (Müller, Kletterausflug, p. 103). Même si, selon le droit suisse, les régions impropres à la culture, tels que les rochers, peuvent être foulés librement (art. 664 al. 2 CC), cela n'autorise pas en soi une utilisation à volonté. L'aménagement d'une voie d'escalade peut constituer un usage commun simple ou accru (pour plus de détails sur l'usage commun, voir Häfelin/Müller/Uhlmann, N 2252 ss).
En Autriche, cette question a été étudiée en détail dans la littérature ainsi que dans la jurisprudence (voir à ce sujet Hinteregger, p. 40 s. avec d'autres références). Selon la littérature et la jurisprudence autrichiennes, l'escalade (grimper, équiper des voies, installer des moyens de sécurité) est couverte par la liberté de passage selon l'article 33 de la loi sur les forêts. Le § 33 de la loi sur les forêts permet à chacun, à l'instar de l'article 664, paragraphe 2, du Code civil, de pénétrer dans la forêt à des fins récréatives. Dans un cas concret, le tribunal autrichien compétent a conclu que l'activité d'escalade ne se distinguait pas fondamentalement de la marche et de la course, même si différents moyens de sécurisation tels que corde, boucles, mousquetons et crochets étaient utilisés. Il a ajouté que l'escalade n'était pas la seule activité couverte par la liberté de mouvement, mais que la pose de pitons et l'aménagement de voies par la pose de pitons étaient également concernés. Le jugement a été confirmé par les deux instances d'appel (pour plus de détails, voir Ermacora, jugement Mizzi Langer, p. 17 ; Hinteregger, p. 40 s.). Selon le droit suisse, il semble également approprié de qualifier l'équipement d'une voie d'escalade d'utilisation conforme d'une paroi rocheuse. Le fait que l'on puisse grimper sur une paroi rocheuse découle de sa nature. De même, la compatibilité avec le public peut tout à fait être affirmée, car d'autres personnes ne sont pas exclues d'une utilisation simultanée de la falaise et de ses environs. Le consentement du propriétaire foncier ou l'obligation d'obtenir une autorisation de la collectivité peuvent toutefois être nécessaires selon le droit suisse, par exemple lorsqu'il s'agit de zones protégées désignées (parc national, districts francs, réserve naturelle, etc.) ou de terrains privés (Winkler/Brehm/Kaltmeier, p. 27 ; von Känel, p. 4).
En résumé, on peut retenir que l'équipement d'une voie d'escalade est en principe autorisé. Le droit en vigueur autorise l'accès aux rochers (art. 664 al. 2 CC). Ensuite, l'équipement d'une voie d'escalade ne constitue pas un usage commun accru. Il reste à examiner au cas par cas si le consentement du propriétaire foncier ou l'obligation d'obtenir une autorisation de la collectivité publique est nécessaire (ainsi que Feser/Lustenberger, p. 6 ; Glünkin, p. 386 ; Müller, Kletterausflug, p. 103).
b. Jardins d'escalade et via ferrata
Ce qui a été dit précédemment s'applique en principe aux jardins d'escalade et aux via ferrata. Une différence essentielle réside dans le fait que les jardins d'escalade et les via ferrata sont des installations plus importantes. Outre les éléments de sécurité plus importants (en particulier pour les via ferrata), les jardins d'escalade et les via ferrata sont également construits dans le but de les rendre accessibles à un plus grand nombre de sportifs/ves. Cela conduit souvent à un meilleur aménagement des voies d'accès, éventuellement sécurisées avec des cordes fixes, des marches en fer ou en bois. La zone au pied de la paroi est également aménagée pour des raisons de sécurité et de confort (sécurisation, débroussaillage, etc.). En règle générale, cette utilisation ne devrait plus relever de l'utilisation conforme des falaises. Dans certains cas (notamment pour les via ferrata), une autorisation doit être obtenue : d'une part un permis de construire, d'autre part une autorisation pour usage accru du public ou pour utilisation spéciale (Müller, Kletterausflug, p. 104).
La Cour suprême autrichienne a constaté que l'aménagement systématique d'un jardin d'escalade (44 voies d'escalade avec 500 pitons fixes) dépassait l'utilisation traditionnelle de la montagne par le public et constituait par conséquent une utilisation d'une paroi rocheuse soumise à autorisation (Hinteregger, p. 42). Une autorisation obligatoire donne à la corporation publique la possibilité de procéder à une pesée des intérêts. L'expérience a montré que les intérêts de la protection de l'environnement (p. ex. zones protégées) peuvent souvent plaider en faveur de l'octroi d'une autorisation assortie de conditions ou même contre l'octroi d'une autorisation (Müller, Kletterausflug, p. 104). Dans le Jura soleurois (Thal et Dorneck), par exemple, des réglementations complètes sur l'escalade ont été édictées afin que l'escalade, la chasse et la protection de la nature puissent être conciliées et coordonnées (pour plus de détails, voir Glünkin, p. 381 et suivantes). En cas de doute, il faut donc partir du principe que les jardins d'escalade et les via ferrata sont soumis à autorisation.
2. obligation de rééquiper de voies d'escalades
a. Voies d'escalade
Grâce à une voie d'escalade aménagée, les grimpeurs/euses peuvent emprunter une voie. Les pitons et les sites existants servent alors de repères et de points d'assurage. Il n'existe pas de règles reconnues par l'État ou les associations professionnelles pour l'équipement ou le rééquipement d'une voie d'escalade (Feser/Lustenberger, p. 8 ; Müller, Haftungsfragen, ch. 116). Il existe toutefois des recommandations (d'équipement ou du rééquipement), qui n'ont toutefois pas (encore) le caractère d'un standard reconnu au sens d'une norme de circulation (Auckenthaler/Hofer, p. 61 ; Burger, p. 151). L'équipement d'une voie n'est également pas réservé à des spécialistes (Müller, Kletterausflug, p. 106). Un autre aspect à prendre en compte est le fait que les ouvreurs d'une voie d'escalade agissent régulièrement sans intérêt commercial et assument eux-mêmes les frais de matériel (Feser/Lustenberger, p. 13).
On peut déduire de ce qui précède qu'il ne peut y avoir d'obligation de rééquiper les voies. Une telle obligation serait déconnectée de la réalité et n'aurait aucun rapport avec l'importance économique d'une voie d'escalade (Müller, Haftungsfragen, n. 132). A cela s'ajoute le fait que les grimpeurs/euses ont généralement intérêt à ce que de nouvelles voies soient ouvertes. Lier l'ouverture de voies à une obligation d'entretien irait à l'encontre de cet intérêt. Enfin, une obligation de rééquiper par les ouvreurs pourrait tout simplement échouer en raison de facteurs tels que l'aptitude technique à l'escalade, l'âge, la maladie, le décès, le changement de domicile, l'abandon de la pratique de l'escalade, etc.
b. Jardins d'escalade et via ferrata
Comme nous l'avons déjà mentionné à propos de l'équipement, la conception des jardins d'escalade et des via ferrata ne correspond pas entièrement à celle des voies d'escalade. Les jardins d'escalade et les via ferrata sont souvent construits dans le but de les rendre accessibles à un large public (Müller, Haftungsfragen, n. 150). Une obligation de rééquipment peut ici déjà être plus facilement admise. Il faut également tenir compte de la manière dont un jardin d'escalade ou une via ferrata est commercialisé vers l'extérieur, si un exploitant se présente activement ou s'il existe un intérêt commercial à l'exploitation du jardin d'escalade ou de la via ferrata.
En Autriche, il existe une position claire concernant l'obligation de rééquiper les jardins d'escalade et les via ferrata. Dans le cas de jardins d'escalade ayant développé (voir ci-dessus n. 6, ch. II.A.1), il n'y a pas d'obligation de rééquipment faute d'exploitant existant. Les voies ont généralement été aménagées à différentes périodes. L'escalade se fait sous sa propre responsabilité. En revanche, pour les jardins d'escalade et les via ferrata aménagés, c'est souvent une organisation telle qu'un office de tourisme, une commune ou un club alpin qui fait office d'exploitant. Celles-ci sont également responsables du maintien en bon état. La jurisprudence exige à cet égard un contrôle annuel ainsi que la réparation d'éventuels dommages ou défauts, voire la fermeture des jardins d'escalade ou des via ferrata (Hinteregger, p. 49 ss.). Il convient de noter que, selon le droit autrichien, les jardins d'escalade et les via ferrata aménagés sont qualifiés de chemins (§ 1319a ABGB) et que le détenteur est responsable du bon état d'un chemin (Auckenthaler/Hofer, p. 39).
Cette situation juridique n'est pas transposable en soi à la Suisse, car les jardins d'escalade (aménagés) et les via ferrata ne sont pas des chemins au sens de la loi fédérale sur les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre. Il convient d'évaluer au cas par cas s'il existe une obligation de rééquipment, mais celle-ci ne pourra jamais aller au-delà de ce qui est raisonnable (contrôle annuel, apposition d'avertissements en cas de danger, indication que le jardin d'escalade n'est pas entretenu, etc.) Enfin, comme pour les voies d'escalade, les grimpeurs/euses ont tout intérêt à ce que de nouveaux sites d'escalade soient ouverts et que des via ferrata soient aménagées. Lier l'ouverture d'un jardin d'escalade ou d'une via ferrata à une obligation de rééquipment irait à l'encontre de cet intérêt.
III. Droit privé
Les accidents d'escalade peuvent avoir les causes les plus diverses : pitons ou supports qui se détachent (ce qui peut à son tour avoir des causes naturelles [éboulements, etc.] ou des erreurs humaines [utilisation inappropriée du matériel, mauvais placement, etc.]), erreurs d'assurage du partenaire d'escalade, éboulements, chutes dans la voie ou lors de l'approche, description erronée de la voie ou guidage erroné de la voie (Feser/Lustenberger, p. 4 ; Müller, Haftungsfragen, n. 114). En conséquence, différentes bases de responsabilité de droit privé entrent également en ligne de compte : responsabilité pour faute, responsabilité du propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage, responsabilité contractuelle, responsabilité fondée sur la confiance (Müller, Haftungsfragen, n. 118).
A. Principe de responsabilité individuelle
L'escalade et la via ferrata comportent des risques que les grimpeurs/euses acceptent en toute connaissance de cause. Ils agissent en grande partie sous leur propre responsabilité et à leurs propres risques (Müller, Haftungsfragen, ch. 24).
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il y a action à ses propres risques lorsque la ou les personnes lésées s'exposent, intentionnellement ou par négligence, au danger concret qui leur est fatal, ou lorsqu'elles augmentent ce danger par leur comportement, intentionnellement ou par négligence, et favorisent ainsi la survenance de l'événement dommageable (arrêt 5A_54/2008 du 30 avril 2008 consid. 4.2 avec d'autres renvois). Pour l'escalade, cela signifie notamment que les dangers inhérents à la pratique de l'escalade sont à la charge des grimpeurs/euses (Burger, p. 149 ss ; Ermacora, Haftung, p. 3). Il en résulte que les grimpeurs/euses doivent se préparer, se former, se protéger et s'informer en conséquence (Müller, Kletterausflug, p. 109 ; Feser/Lustenberger, p. 17). Agir à ses propres risques n'a pas pour conséquence que les personnes lésées n'ont pas droit à des dommages et intérêts, mais peut conduire à une réduction ou à une suppression des dommages et intérêts (BK-Brehm, Art. 44 OR N 9 ss.). Il faudra donc juger au cas par cas de l'étendue de la responsabilité personnelle des grimpeurs/euses et de son impact sur une éventuelle responsabilité.
B. Responsabilité pour faute
Celui/celle qui cause un dommage à autrui de manière illicite, que ce soit intentionnellement ou par négligence, est tenu-e- de le réparer (art. 41 CO). Les conditions de la responsabilité pour faute sont l'existence d'un dommage, le lien de causalité, l'illicéité du dommage et la faute de l'auteur du dommage. Le fardeau de la preuve incombe à la personne lésée (art. 8 CC ; cf. aussi arrêt 4A_399/2012 du 3 décembre 2012 consid. 2.1).
1. Conditions de responsabilité
Pas de responsabilité civile sans dommage ! Le dommage est la condition sine qua non de la responsabilité civile (BK-Brehm, Art. 41 OR N 69, pour plus de détails N 70 ss). En l'absence de dommage, les autres conditions de l'art. 41 CO sont sans importance (arrêt 4C_412/2004 du 23 février 2005 consid. 4). En cas d'accident d'escalade, différents types de dommages entrent en ligne de compte : les dommages corporels (toutes les pertes matérielles causées par des lésions corporelles ou la mort d'une personne), les dommages matériels (dommages causés par la détérioration, la destruction ou la perte d'une chose) ainsi que les dommages de frustration (pertes matérielles dues à des dépenses déjà effectuées qui deviennent obsolètes en raison d'un accident d'escalade ; cf. sur l'ensemble Müller, Haftungsfragen, n. 49 ss).
La responsabilité pour un dommage n'est donnée que s'il existe un lien de causalité entre le comportement et le résultat (pour plus de détails, voir BK-Brehm, Art. 41 OR N 103 ss). Si un matériel défectueux (pitons, équipement d'escalade), une mauvaise utilisation des éléments d'assurage (lors de l'ouverture de la voie ainsi que lors de l'assurage des grimpeurs/euses) ou un guide ou une description erronée de la voie conduisent à un accident, le lien de causalité devrait en général être donné.
Il y a en principe toujours illicéité lorsqu'il y a atteinte à des biens juridiques absolus tels que la vie, l'intégrité corporelle, la santé, d'autres droits de la personnalité ainsi que la propriété ou la possession (BK-Brehm, Art. 41 OR N 35). Le patrimoine en tant que tel n'est pas un bien juridique protégé de manière absolue. En cas de dommage purement patrimonial, en l'absence d'une norme de protection générale, il faut d'abord déterminer si une norme de comportement particulière a été violée (arrêt 4A_337/2018 du 9 mai 2019 consid. 4.1.1). Dans le cas d'un accident d'escalade, un bien juridique protégé de manière absolue devrait régulièrement être touché, de sorte que l'illicéité est en principe donnée. S'il s'agit uniquement de la réparation d'un dommage de frustration, il faudrait examiner au cas par cas si une norme de comportement particulière s'applique.
Un comportement ne sera pertinent du point de vue du droit de la responsabilité civile que s'il y a faute (pour plus de détails, voir BK-Brehm, Art. 41 OR N 166 et suivants). Dans le cas d'un accident d'escalade, il ne sera guère question d'un événement provoqué intentionnellement (dol) ou d'un événement dont on s'est accommodé (dol éventuel). En règle générale, un accident est provoqué par négligence.
2. Responsabilité des partenaires d'escalade.
Lorsqu'une cordée s'engage ensemble sur une voie d’escalade, des devoirs réciproques de protection et de diligence apparaissent. Les partenaires d'escalade sont tenus, dans la mesure de leurs possibilités, de s'aider et de se soutenir mutuellement dans l'accomplissement de la course (Hinteregger, p. 46). Si un comportement manifestement fautif au sein de la cordée conduit à un accident, les conditions de l'art. 41 CO devraient en général être remplies. La mesure de la diligence des partenaires d'escalade s'évalue alors selon les règles fondamentales de l'escalade et les mesures standard. Il faut y opposer le principe de la responsabilité individuelle (Müller, Kletterausflug, p. 112).
Si l'un-e- des grimpeurs/euses est techniquement meilleur-e- et plus expérimenté-e-, cela n'implique pas en soi qu'il ou elle assume la responsabilité de la sécurité des autres. Selon la littérature et la pratique autrichiennes, de telles obligations peuvent toutefois survenir lorsqu'un/une grimpeur/euse assume explicitement ou de manière concluante la responsabilité de la sécurité des autres (avec des références à la jurisprudence Hinteregger, p. 47). C'est le cas lorsqu'un/une grimpeur/euse expérimenté-e- emmène des débutants en escalade et leur cache les difficultés et les dangers qu'ils ne perçoivent pas, ou les persuade de faire une ascension en minimisant les difficultés et les dangers. Dans de tels cas, la confiance accordée par le/ grimpeur/euse inexpérimenté-e- au partenaire plus compétent mérite d'être protégée. Les meneurs de fait à titre "de complaisance" ne sont certes pas jugés à l'aune des connaissances et des capacités des guides de montagne professionnels exerçant à titre commercial, mais ils doivent néanmoins satisfaire à un critère de diligence objectif. La situation de confiance créée par le comportement antérieur (inviter ou persuader l'autre) est déterminante pour l'étendue des devoirs de diligence attribués (Hinteregger, p. 47 ; Ermacora, Eigenverantworking, p. 4 s.). En Suisse, il n'existe pas encore de jurisprudence à ce sujet. Mais la littérature part également du principe que les guides "par complaisance" ont des devoirs de protection et de diligence plus étendus envers les autres grimpeurs/euses qui n'assument pas de responsabilité de guide (Christen, p. 270). Selon la jurisprudence générale du Tribunal fédéral en matière de complaisance, la responsabilité du meneur de fait (personne expérimentée) est engagée selon les principes de la responsabilité délictuelle. Il n'y a donc pas de relation contractuelle ou quasi-contractuelle (arrêt 4A_275/2011 du 20 octobre 2011 consid. 4.1 et 5.1). Dans ce contexte, le meneur de fait ne doit faire preuve que de la diligence qu'il observerait pour soi-même (diligence dite habituelle ou diligentia quam in suis ; ATF 137 III 539 consid. 5.2 ; arrêt 4A_604/2017 du 30 avril 2018 consid. 3.5). Il reste à voir si, dans un cas concret, un tribunal se prononcera en faveur d'un devoir de protection et de diligence plus étendu des guides d'escalade "par complaisance" ou suivra la jurisprudence générale du Tribunal fédéral.
3. Responsabilité des professeur-e-s d'escalade
La responsabilité pour faute entre en principe aussi en ligne de compte lorsqu'une personne ou un groupe est en route avec des professeur-e-s d'escalade. Une responsabilité peut être engagée lorsque les professeur-e-s d'escalade ne respectent pas leur devoir de diligence, p. ex. en effectuant une sortie d'escalade malgré de mauvaises conditions météorologiques, en instruisant, corrigeant ou surveillant insuffisamment des grimpeurs/euses inexpérimentés ou en ne respectant pas d'autres mesures de sécurité (Müller, Kletterausflug, p. 111 s. ; Winkler/Brehm/Kaltmeier, p. 111). L'étendue de ces devoirs de diligence se mesure aux circonstances particulières du cas d'espèce et ne doit pas dépasser le cadre de ce qui est raisonnablement exigible (Hinteregger, p. 45 avec d'autres références ; Ermacora, Haftung, p. 3). De même, la responsabilité personnelle des grimpeurs/euses doit être respectée (Müller, Kletterausflug, p. 112).
L'escalade de plusieurs longueurs ainsi que la via ferrata sont considérées comme des activités à risque au sens de la Loi fédérale ainsi que l’ordonnance sur les guides de montagne et les organisateurs d’autres activités à risque (art. 3 al. 1 let. f et h ORisque). Dès que les professeur-e-s d'escalade prévoient une escalade de plusieurs longueurs avec des clients, une formation reconnue et une autorisation sont d'une part nécessaires (art. 3 LRisque en relation avec l'art. 6 al. 1 et 4 ORisque). D'autre part, la loi concrétise différents devoirs de diligence qui entrent en ligne de compte lors de l'examen d'une éventuelle responsabilité pour faute (par exemple le devoir d'information concernant des dangers particuliers, la vérification des capacités de la clientèle ou la garantie que le matériel ne présente aucun défaut et que les installations sont en bon état ; cf. art. 2 al. 2 LRisque).
Même si la loi sur les activités à risque ne définit comme activités à risque que l'escalade de plusieurs longueurs et la via ferrata, et que par conséquent les cours d'escalade dans les jardins d'escalade ne nécessitent ni formation reconnue de professeur-e- d'escalade ni autorisation (Christen, p. 269), les obligations de diligence des professeur-e-s d'escalade mentionnées dans la loi et l’ordonnance sur les activités à risque devraient s'appliquer à toutes les activités d'escalade. Dans le domaine de l'escalade sportive également, il semble approprié et raisonnable que les professeur-e-s d'escalade aient un devoir d'information, que les capacités de la clientèle ainsi que l'absence de défauts du matériel soient vérifiées. Étant donné qu'aucune formation reconnue n'est requise dans le domaine de l'escalade sportive, le devoir de diligence devrait être un peu moins important.
4. Responsabilité des ouvreurs de voies
Pour qu'une responsabilité des ouvreurs de voies selon l'art. 41 CO puisse être engagée, il faut d'une part savoir qui sont les ouvreurs (et que celui-ci est encore en vie) et quand la voie a éventuellement été rééquipée. En outre, il faut prouver que la voie d'escalade a été équipée et/ou rééquipée de manière défectueuse, en violation de ses obligations (Müller, Haftungsfragen, n. 116, 120). Comme expliqué précédemment, il n'existe pas de règles reconnues par l'Etat ou les associations professionnelles pour l’ouverture ou le rééquipement des voies. De même, l'ouverture d'une voie n'est pas réservée à des spécialistes (voir n. 21, ch. II.B.2.a ci-dessus). Compte tenu de ce qui précède et du fait que l’ouverture ou le rééquipement d'une voie d'escalade ne poursuit pas d'intérêts commerciaux, on peut en conclure que les grimpeurs/euses ne peuvent en principe pas avoir une confiance légitime dans la sécurité d'une voie d'escalade. Au titre de la responsabilité individuelle, les grimpeurs/euses doivent remettre en question la sécurité d'une voie d'escalade ainsi que leurs propres capacités. Il ne devrait guère être possible de prouver une faute de la part de l’ouvreur de voies (Müller, Haftungsfragen, ch. 120, 123 ; Müller, Kletterausflug, p. 104).
Pour les jardins d'escalade et surtout les via ferrata, la situation doit être considérée de manière plus nuancée. Comme mentionné plus haut, les jardins d'escalade et les via ferrata sont souvent aménagés dans l'intention de les ouvrir à un plus large public. La publicité pour une via ferrata ou un jardin d'escalade, les panneaux indicateurs pour l'accès, les panneaux de signalisation et en particulier les panneaux "ouvert" peuvent influencer ou augmenter les exigences de sécurité posées aux ouvertures ou aux assainisseurs. Des exigences plus élevées en matière de sécurité ont pour conséquence que les obstacles à une négligence contraire aux devoirs sont plus bas et que même de petits manquements aux devoirs peuvent justifier une faute (Müller, Haftungsfragen, ch. 147 ; Müller, Kletterausflug, p. 105).
5. Responsabilité des tiers
Les accidents d'escalade peuvent également être causés par des tiers, par exemple lorsqu'un chemin de randonnée passe au-dessus d'une voie d'escalade et que des randonneurs provoque des chutes de pierres qui tombent dans la voie d'escalade, ou encore lorsque plusieurs cordées se trouvent sur une voie d'escalade et que la première cordée provoque des chutes de pierres. Il en va de même pour les via ferrata, où plusieurs personnes se trouvent généralement en même temps sur la via ferrata. Dans ces cas également, une responsabilité selon l'art. 41 CO est envisageable. Mais celle-ci dépendra à nouveau du fait que la faute puisse être prouvée.
Il existe déjà une jurisprudence concernant le déclenchement blâmable d'avalanches ayant entraîné la mort de personnes (cf. les références aux jugements dans Müller, Haftungsfragen, n. 273). Il est donc tout à fait possible d'imaginer des constellations dans lesquelles le comportement de tiers peut conduire à un dommage engageant la responsabilité. En particulier lorsque plusieurs personnes ou cordées se trouvent sur la même voie d'escalade ou dans une via ferrata, la responsabilité individuelle devrait peser lourd dans la balance. Ainsi, il devrait être clair pour les grimpeurs/euses que le risque de chute de pierres est par exemple plus élevé lorsqu'une cordée grimpe dans la même voie ou que de nombreuses personnes sont proches les unes des autres dans une via ferrata. Les grimpeurs/euses doivent évaluer le risque et, si nécessaire, renoncer à s'engager dans la même voie ou attendre qu'il y ait suffisamment de distance.
C. Responsabilité du propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage
Le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage doit répondre du dommage causé par des vices de construction ou par le défaut d’entretien (art. 58 al. 1 CO). Les conditions sont à nouveau un dommage, la causalité ainsi que l'illicéité du dommage. Contrairement à la responsabilité pour faute, la responsabilité du propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage est une responsabilité causale, dans laquelle le dommage est causé par un ouvrage défectueux indépendamment de la faute.
1. Conditions de responsabilité
En ce qui concerne le dommage, la causalité et l'illicéité, il est renvoyé aux explications relatives à la responsabilité pour faute (voir ci-dessus n. 30, ch. III.B.1). Ci-après, nous nous pencherons exclusivement sur la notion d'ouvrage et d'origine des défauts.
Un ouvrage au sens de l'art. 58 CO est un objet matériel qui a été façonné par la main de l'homme et qui est lié directement ou indirectement de manière fixe au sol (BK-Brehm, Art. 58 OR N 26). Une voie d'escalade est créée par l'installation d'éléments permanents dans le rocher (pitons, emplacements, etc.) qui définissent le tracé de la voie ou le chemin. Les avis divergent quant à la question de savoir si les caractéristiques de l'ouvrage sont remplies (pour : BK-Brehm, Art. 58 OR N 45 ; Müller, Kletterausflug, p. 106 ; Müller, Haftungsfragen, n. 125 ; Stark, p. 398 s. ; contre : Feser/Lustenberger, p. 14 s.). Dans le cas présent, on part du principe qu'une voie d'escalade constitue un ouvrage au moins lorsqu'elle est équipée de pitons fixes percés ou collés ainsi que de postes intermédiaires et de rappel. Dans le cas des voies d'escalade dites "clean" (escalade sans pitons avec des moyens d'assurage mobiles qui sont ensuite retirés), la notion d’ouvrage ne devrait pas être remplie. Dans le cas des jardins d'escalade et en particulier des via ferrata, il s'agit de grandes installations conçues par la main de l'homme et directement reliées au sol ou au rocher, ce qui devrait clairement satisfaire à la notion d'ouvrage (Müller, Haftungsfragen, ch. 149 ; Schwenzer/Fountoulakis, ch. 53.25 ; Directives du CAS Environnement et développement territorial, p. 20).
L'appréciation de l'origine des défauts se fait sur la base des circonstances concrètes du cas d'espèce. Le but de l'ouvrage revêt une importance primordiale (Schwenzer/Fountoulakis, n. 53.24 ; BK-Brehm, Art. 58 OR n. 54 ss.). Une obligation de sécurité n'existe en outre que dans la mesure où elle est proportionnée et raisonnablement exigible (Schwenzer/Fountoulakis, n. 53.26 ; BK-Brehm, Art. 58OR N 54a). Le Tribunal fédéral ajoute que la sécurité d'un ouvrage se mesure également à l'utilisation conforme à sa destination (arrêt 4C_386/2004 du 2 mars 2005 consid. 2.1 ; arrêt 4A_612/2010 du 14 février 2011 consid. 2.3). Cela se base à nouveau sur le cercle d'utilisateurs respectif, le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage pouvant s'attendre à un comportement prudent raisonnable et correspondant à la moyenne générale (Müller, Haftungsfragen, ch. 80, 88 ; Schwenzer/Fountoulakis, ch. 53.25).
Le but d'une voie d'escalade est d'offrir aux grimpeurs/euses la possibilité d'escalader la voie en utilisant les pitons existants. Comme mentionné précédemment, les grimpeurs/euses doivent s'interroger sur la qualité et la sécurité d'une voie d'escalade. Les grimpeurs/euses sont en outre libres d'installer des dispositifs de sécurité supplémentaires (coinceurs, friends) (Müller, Haftungsfragen, ch. 127 ss.). Dans le cas des jardins d'escalade et des via ferrata, le but diffère de celle de la voie d'escalade. Les jardins d'escalade et en particulier les via ferrata sont construits dans le but d'être accessibles à un large public (Müller, Kletterausflug, p. 107 ; pour plus de détails, Müller, Haftungsfragen, n. 150 ss). Mais cela ne dispense pas les grimpeurs/euses de s'interroger sur les conditions sur place et sur l'état du matériel utilisé. C'est justement dans les jardins d'escalade et les via ferrata très fréquentés que la fatigue et l'usure du matériel peuvent survenir plus rapidement que dans les voies d'escalade (p. ex. mousquetons encochés en raison du frottement de la corde).
En ce qui concerne la proportionnalité et l'exigibilité d'une obligation de sécurité, il faudra évaluer au cas par cas quelles mesures doivent être prises (Müller, Haftungsfragen, ch. 130 s. ; Feser/Lustenberger, p. 15). Il faut tenir compte du fait que les ouvreurs de voies ne sont pas soumis à une obligation de formation et que l'ouverture d'une voie d'escalade n'est pas réglementée par la loi. On peut toutefois s'attendre à ce que les dangers concrètement identifiables soient pris en compte lors de l'aménagement d'une voie d'escalade (éviter les roches friables et les dalles fragiles, placer des pitons de manière judicieuse). On ne peut pas admettre une obligation d'assainissement (voir ci-dessus n. 22, ch. II.B.2.a). Compte tenu du but recherché ainsi que de l'importance économique des jardins d'escalade et des via ferrata (voir également n. 23 ci-dessus, ch. II.B.2.b), des mesures plus poussées en matière d'aménagement et d'entretien sont acceptables. Les mesures considérées comme raisonnables en Autriche semblent également applicables pour la Suisse : un contrôle annuel des installations ; des contrôles supplémentaires après des intempéries ; une information, éventuellement la fermeture du chemin, si aucun contrôle ne peut être effectué ou si le jardin d'escalade ou la via ferrata n'a pas été contrôlé depuis longtemps (Hinteregger, p. 50 ; ainsi que Müller, Haftungsfragen, ch. 156).
En résumé, les grimpeurs/euses qui empruntent une voie d'escalade - que ce soit dans un jardin d'escalade, une via ferrata ou une voie alpine - agissent sous leur propre responsabilité. Il ne faut pas se fier à l'absence de défauts d'une voie (voir ch. III.A, n. 28 ci-dessus). La responsabilité individuelle est diminuée là où les grimpeurs/euses peuvent légitimement avoir confiance en l'absence de défauts, par exemple les sécurités d'une via ferrata, qui reposent justement sur le principe qu'il n'est pas nécessaire d'installer d'autres sécurités (Müller, Haftungsfragen, ch. 158).
2. Responsabilité des propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage
Les propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage sont responsables d'un ouvrage défectueux. La question de la légitimation passive se pose donc en premier lieu. Les propriétaires des droits réels des terrains impropres à la culture et donc du matériel installé en falaise (pitons, poteaux) sont généralement les collectivités publiques (art. 644 al. 2 CC en relation avec l'art. 671 al. 1 CC). La plupart du temps, l'équipement et, le cas échéant, la rééquipement des voies d'escalade ne sont pas effectués sur mandat des collectivités publiques, mais résultent de l'initiative personnelle de particuliers. Même si aujourd'hui, dans de nombreux cas, les guides d'escalade et les sites Internet (cf. https://www.rebolting.ch) indiquent l'auteur/trice ou l’ouvreur de la voie, l'année d'ouverture et les informations relatives à la rééquipement de la voie, on ne peut pas partir du principe que ces personnes sont également propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage. Si l'on tient compte du but d'une voie d'escalade, de l'intérêt des aménageurs et des collectivités publiques, il semble problématique de considérer aussi bien les aménageurs que les collectivités publiques comme propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage (Müller, Haftungsfragen, n. 136). Dans le cas des via ferrata et des jardins d'escalade, il est plus facile d'identifier les propriétaires. Les via ferrata ou les jardins d'escalade des remontées mécaniques ou des cabanes ont souvent des exploitants visibles de l'extérieur (cf. p. ex. https://www.engelberg.ch/sommer/klettersteige-klettern/klettersteige, https://grindelwald.swiss/de/sommer/sehen-und-erleben/wandern/klettersteige/, https://www.valais.ch/de/aktivitaeten/sommersport/klettersteige, https://jungfrauregion.swiss/de/sommer/sehen-und-erleben/aktivitaeten/klettern/klettergarten-riggli/). Dans ces cas, une légitimation passive des exploitants devrait être indiquée, même s'ils ne sont pas propriétaires fonciers (cf. sur la divergence entre la propriété relevant du droit des biens et celle relevant du droit de la responsabilité civile BK-Brehm, Art. 58 OR N 5 ss). Pour les jardins d'escalade sans exploitant perceptible, ce sont plutôt les collectivités publiques qui devraient avoir la légitimation passive (Müller, Haftungsfragen, n. 159).
En résumé, on peut retenir qu'une revendication de grimpeurs/euses accidentés dans des voies d'escalade à l'encontre des propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage ne sera guère réalisable. Si des propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre devaient être identifiés, une responsabilité devrait se heurter aux critères de la finalité de la voie d'escalade, de l'acceptabilité des mesures de sécurité et de la responsabilité personnelle des grimpeurs/euses. En ce qui concerne les informations contenues dans les guides d'escalade et sur les sites Internet relatives à l'accès à la voie, à l'assurage, à l'assainissement, à la qualité du rocher, etc. On ne peut pas non plus en déduire un droit à l'absence de défauts de la voie d'escalade (comme le fait Müller, Haftungsfragen, n. 137).
Dans le cas des via ferrata et des jardins d'escalade, il est probable que les exploitants soient les propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage. En raison du but économique, les conditions pour faire valoir un défaut d'ouvrage est également plus bas. Mais les critères de l'acceptabilité des mesures de sécurité et de la responsabilité personnelle des grimpeurs/euses s'appliquent également aux jardins d'escalade et aux via ferrata. La responsabilité du propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage n'est engagée qu'en cas de défauts graves (voir aussi Müller, Kletterausflug, p. 109).
3. Excursus sur les installations artificielles d'escalade
Avec le développement fulgurant de l'escalade sportive, les installations artificielles d'escalade (salles d'escalade, murs d'escalade sur les aires de jeux ou dans les salles de sport, etc.) gagnent en importance. Les salles d'escalade artificielles sont clairement des ouvrages au sens de la responsabilité du propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage. Il sera également facile d'identifier les exploitants d'installations sportives. Les propriétaires ou exploitants d'une installation artificielle d'escalade doivent donc prendre toutes les mesures de précaution nécessaires et raisonnables afin d'éviter un dommage. La série de normes DIN EN 12572 définit en outre des exigences minimales pour les installations d'escalade artificielles et leurs points de sécurité ainsi que pour les salles de blocs et les prises d'escalade (cf. aussi Bureau de prévention des accidents, p. 2). Une responsabilité du propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage devrait plutôt entrer en ligne de compte pour les installations d'escalade artificielles, car il existe des exigences et des normes de sécurité claires qui doivent être respectées. Mais même dans le cas d'installations d'escalade artificielles, l'escalade se fait en principe sous sa propre responsabilité et un risque résiduel subsiste. Si l'utilisation d'une installation artificielle d'escalade se fait contre rémunération, il faudra également examiner une responsabilité contractuelle (voir à ce sujet n. 54 ci-après).
D. Responsabilité contractuelle et responsabilité fondée sur la confiance
Les conditions d'une responsabilité contractuelle sont l'existence d'un contrat, d'un dommage, d'une violation du contrat, d'un lien de causalité et d'une faute. La responsabilité contractuelle et la responsabilité extracontractuelle sont en concurrence.
1. Conditions de responsabilité
En ce qui concerne le dommage, la causalité et la faute, on peut en principe se référer aux explications relatives à la responsabilité pour faute (voir supra n. 30, ch. III.B.1). Contrairement à la responsabilité extracontractuelle, un renversement du fardeau de la preuve s'applique à la responsabilité contractuelle. La faute est présumée (Klaus/Meyer, p. 389 s.). Il incombe au débiteur d'apporter la preuve de l'exonération (art. 97 al. 1 CO).
L’obligation contractuelle nécessite l'expression d'une volonté réciproque et concordante des parties (BK-Müller, Art. 1 OR N 195). Concrètement, cela signifie une manifestation de volonté réciproque explicite ou implicite, un consensus, un accord sur les points essentiels du contrat et la capacité des parties (majorité et capacité de discernement). De même, le respect d'éventuelles prescriptions de forme doit être respecté (pour plus de détails, voir Schwenzer/Fountoulakis, n. 27.01 et suivants). Si une obligation ne peut pas être exécutée ou ne peut l'être que de manière imparfaite, le débiteur est tenu de réparer le dommage qui en résulte, à moins qu'il ne prouve qu'aucune faute ne lui est imputable (art. 97 al. 1 CO). Même si l'article 97 CO s'applique à toutes les obligations, il s'agit en premier lieu d'obligations fondées sur un contrat. La violation d'une obligation au sens de l'article 97 CO équivaut généralement à une violation du contrat.
Outre les prestations convenues par contrat, les devoirs de diligence, en tant qu'élément clé des obligations contractuelles accessoires, nécessitent une mention particulière (BK-Werner/Emmenegger, Art. 97 OR N 25 ss.). Les dommages-intérêts pour violation du devoir de diligence (responsabilité dite de confiance) ne présupposent pas obligatoirement une relation contractuelle. Pour qu'un droit naisse, il faut un lien juridique spécial, l'impossibilité ou l'inacceptabilité de conclure le contrat, la création d'un intérêt digne de protection ainsi qu'une déception de la confiance contraire à la loyauté. La responsabilité fondée sur la confiance se situe entre le contrat et le délit.
Le Tribunal fédéral soumet toutefois la responsabilité pour confiance éveillée et déçue à des conditions strictes. Ne mérite pas d'être protégé celui qui est simplement victime de sa propre imprudence et de sa confiance ou de la réalisation de risques commerciaux généraux, mais seulement celui dont la confiance légitime a été abusée (arrêt 4A_299/2015 du 2 février 2016 consid. 3.3 avec renvois). En ce qui concerne l'escalade, on peut penser avant tout aux devoirs d'information, d'explication ou de mise en garde en faveur des grimpeurs/euses (cf. également Müller, Haftungsfragen, n. 102).
2. Responsabilité des professeur-e-s d'escalade/organisateurs
Lorsqu'une personne ou un groupe se déplace avec des professeur-e-s d'escalade, on peut supposer qu'il existe une relation contractuelle (mandat selon l'art. 394 CO). En tant que mandataires, les professeur-e-s d'escalade et les organisateurs doivent faire preuve de diligence et de fidélité. Ils sont tenus de dédommager le client si celui est lésé par un manque de soin ou de loyauté dans l'exécution du mandat (BK-Fellmann, Art. 394 OR N 216 ss.). La prestation contractuellement due par les professeur-e-s d'escalade ou les organisateurs consiste donc à préparer et à guider la randonnée d'escalade de manière irréprochable. Ceci en évitant au mieux tous les dangers pour les clients (Müller, Haftungsfragen, n. 295). Comme mentionné précédemment, l'escalade de plusieurs longueurs ainsi que la via ferrata sont considérées comme des activités à risque au sens de la loi sur les activités à risque (cf. supra n. 37, ch. III.B.3). La loi ne fonde pas un état de fait propre à la responsabilité, mais concrétise différents devoirs de diligence qui peuvent être utilisés lors de l'examen d'une éventuelle violation du devoir de diligence (cf. art. 2 al. 2 LRisque).
Les professeur-e-s d'escalade sont par conséquent responsables s'ils ne respectent pas leur devoir de diligence, par exemple s'ils effectuent une course malgré de mauvaises conditions météorologiques, s'ils instruisent, corrigent ou surveillent insuffisamment des grimpeurs/euses inexpérimentés (cf. aussi les devoirs de diligence selon l'art. 2 al. 2 LRisque ; cf. aussi Winkler/Brehm/Kaltmeier, p. 111). En ce qui concerne une éventuelle responsabilité de l'organisateur, ce sont surtout le choix, la surveillance et l'instruction des professeur-e-s d'escalade et le choix des courses d'escalade ainsi que la description de la course qui seront déterminants (Müller, Kletterausflug, p. 112). La responsabilité personnelle des grimpeurs/euses devra cependant toujours être mise en parallèle avec le devoir de diligence des professeur-e-s d'escalade ou des organisateurs.
3. Responsabilité de l’ouvreur de voie/de l'exploitant
Dans le cas d'une voie d'escalade isolée, on ne peut guère imaginer de cas dans lesquels il existe un rapport contractuel ou un lien juridique particulier (responsabilité fondée sur la confiance) entre les grimpeurs/euses et l’ouvreur de voie qui aurait aménagé ou rééquipé ladite voie (Müller, Haftungsfragen, ch. 138).
Il existe cependant des via ferrata et des jardins d'escalade qui ne sont ouverts que contre paiement ou, par exemple, aux membres d'une association (p. ex. le jardin d'escalade Palestra di Roccia à Belinzona https://www.ticino.ch/it/commons/details/Palestra-di-Roccia-San-Paolo/85221.html). Dans de tels cas, on peut partir du principe qu'il existe une relation contractuelle. Les exigences relatives aux obligations de sécurité fondées sur un contrat correspondent à peu près à celles de la responsabilité du propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage (Müller, Haftungsfragen, n. 162 ; Müller, Kletterausflug, p. 111). Dans la mesure où cela est raisonnable et proportionné, on peut partir du principe que l'exploitant contrôle régulièrement la via ferrata ou le jardin d'escalade, éventuellement en plus après des intempéries, qu'il donne des informations, qu'il installe des barrières de chemin si nécessaire.
E. Appréciation
La question de la responsabilité dépendra toujours d'une évaluation stricte au cas par cas. Le principe de la responsabilité individuelle joue un rôle important à cet égard. Seules les violations graves du devoir de diligence permettront d'établir une responsabilité.
L'évolution de l'escalade vers un sport de masse doit cependant aussi être prise en compte dans la responsabilité contractuelle et extracontractuelle. Par rapport au passé, de nombreuses personnes aux ambitions et aux niveaux très différents pratiquent aujourd'hui l'escalade. Une multitude d'informations concernant les voies d'escalade, la qualité du rocher, les normes de sécurité, l'assainissement, etc. sont disponibles via divers canaux (guides d'escalade sous forme de livres ou en ligne, sites Internet, applications d'escalade, etc.). Il n'est pas toujours possible de savoir s'il s'agit d'opinions personnelles ou d'informations officielles. Il semble toutefois clair que les grimpeurs/euses peuvent, dans une certaine mesure, se fier à ces informations et faire confiance à leur exactitude. Cela signifie à l'inverse que ceux qui publient des informations sur les voies d'escalade, les jardins d'escalade et les via ferrata assument une responsabilité vis-à-vis de leurs utilisateurs. Afin d'exclure d'éventuels recours en responsabilité, il semble déterminant que les personnes/organisations qui publient des informations précisent dans quel rôle ces informations sont générées (perception purement personnelle ; association qui évalue et/ou réhabilite quasi officiellement des voies ; maison d'édition qui propose des guides d'escalade et de via ferrata sur papier et en ligne contre rémunération ; exploitant qui informe de l'ouverture de la via ferrata ; etc.) Afin de rappeler aux grimpeurs/euses leur propre responsabilité, ces informations devraient toujours être complétées par une échelle de sérieux généralement reconnue et pertinente.
IV. Droit pénal
Les accidents d'escalade peuvent avoir des conséquences non seulement sur le plan civil, mais aussi sur le plan pénal. Les actes punissables contre la vie et l'intégrité corporelle (lésions corporelles intentionnelles ou par négligence [art. 122-125 CP], voies de fait [art. 126 CP] et, dans le pire des cas, homicide intentionnel ou par négligence [art. 113 et 117 CP]) sont au premier plan. Il convient également de tenir compte de l'obligation de sauvetage (art. 128 CP).
A. Conditions de la punissabilité
Les conditions de la punissabilité sont en principe la réalisation de l'infraction (éléments constitutifs objectifs et subjectifs), l'illicéité et la culpabilité.
Les éléments objectifs de l'infraction, notamment les atteintes à la vie et à l'intégrité corporelle, ainsi que la culpabilité de l'auteur (capacité de l'auteur à comprendre le caractère illicite de son acte, art. 19 al. 1 CP) devraient normalement être réunis en cas d'accident de sport. Il convient d'examiner les éléments subjectifs de l'infraction et l'illicéité (Hügi, n. 19 ; Arter/Gut, p. 93).
Si l'on parle d'un accident, on peut partir du principe que la négligence (art. 12 al. 3 CP) ou tout au plus le dol éventuel (la survenance du résultat est considérée comme possible et acceptée, cf. à ce sujet ATF 134 IV 26 consid. 3.2.2) peuvent entrer en ligne de compte. L'existence d'un dol éventuel ou d'une négligence dépend entre autres de la gravité de la violation du devoir de diligence et de la facilité avec laquelle le risque connu de l'auteur peut se réaliser. Lors de la détermination du comportement admissible et de l'obligation de diligence à respecter, les "règles du jeu" pertinentes ont également une importance particulière. Plus les règles de comportement et de jeu sont clairement enfreintes, moins on peut parler de la réalisation d'un risque inhérent au sport, ce qui peut fonder la responsabilité pénale de l'auteur (Hügi, n. 22 ; Arter/Gut, p. 101 ; Kocholl, p. 22).
Comme pour la responsabilité civile, l'illicéité fait défaut pour les faits relevant du droit pénal lorsqu'il existe un motif justificatif. Dans le cas des activités sportives, il faut notamment considérer le consentement des sportifs/ves au risque inhérent au sport et donc la conscience de pouvoir être blessé (Hügi, n. 23 ; Arter/Gut, p. 101). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, on ne peut plus considérer qu'il y a consentement lorsqu'une règle de comportement ou de jeu visant à protéger les sportifs/ves est enfreinte intentionnellement ou de manière grave (ATF 134 IV 26 consid. 3.2.4 ; ATF 121 IV 249 consid. 4).
B. Punissabilité des partenaires d'escalade
On peut partir du principe que les partenaires d'escalade ont un comportement pénalement répréhensible lorsque les règles de l'escalade en vigueur sont clairement enfreintes. Il peut s'agir d'un comportement négligent de la part de l'assureur (erreur de freinage, inattention, mauvaise manipulation du dispositif d'assurage, etc.
Aussi sur es voies de via ferrata, on peut imaginer des cas de figure qui peuvent être pénalement répréhensibles. Il est par exemple recommandé qu'une seule personne se trouve entre deux ancrages (Winkler/Brehm/Kaltmeier, p. 132). Malgré cela, on grimpe souvent trop près les uns des autres. Dans ce cas, c'est celui qui suit trop rapidement qui est en infraction et non celui qui tombe (Kocholl, p. 20).
C. Punissabilité des professeur-e-s d'escalade
Les professeur-e-s d'escalade devront également répondre de leurs actes devant la justice pénale s'il est possible de prouver subjectivement qu'ils ont eu un comportement pénalement répréhensible et que ce comportement est illégal.
Comme pour les fondements de la responsabilité civile, un comportement relevant du droit pénal peut être supposé plus facilement que pour les partenaires d'escalade assimilés, car les professeur-e-s d'escalade ont une position de garant. Les obligations découlant de cette position de garant sont le pendant des obligations de sécurité de droit civil (Arter/Gut, p. 96).
Comme l'escalade de plusieurs longueurs et la via ferrata sont soumises à la loi sur les activités à risque (art. 6 al. 1 et 4 ORisque ; voir aussi n. 37, ch. III.B.3. ci-dessus), la disposition pénale de la loi sur les activités à risque s'applique également. Les infractions aux dispositions de la loi sur les activités à risque sont punies d'une amende de 10'000 francs au maximum. Les éléments constitutifs de l'infraction sont l'obtention frauduleuse d'une autorisation par des indications incomplètes, inexactes ou trompeuses (art. 15 al. 1 let. a LRisque) ou le fait de proposer une activité à risque sans autorisation (art. 15 al. 1 let. b LRisque). En ce qui concerne les professeur-e-s d'escalade, il convient de noter que la disposition pénale ne s'applique que lorsqu'une activité est proposée au sens de la loi sur les activités à risque. Un comportement pénalement répréhensible pendant un cours dans un jardin d'escalade n'est pas déterminant pour la loi sur les activités à risque.
D. Punissabilité de l'organisateur/propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage
En ce qui concerne la responsabilité pénale, l'organisateur et le propriétaire de l'ouvrage peuvent être considérés ensemble. L'organisateur et le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage ont une position de garant, c'est-à-dire l'obligation pénale de prévenir tous les dangers et les dommages ou de garder sous contrôle une certaine source de danger. Les limites de l'obligation de défense se situent d'une part dans l'exigibilité et d'autre part dans l'action à ses propres risques et périls ou dans la faute des sportifs/ves (Arter/Gut, p. 94 s.).
L'organisateur de l'escalade ainsi que le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage d'un jardin d'escalade ou d'une via ferrata devront répondre de l'instruction du personnel, du choix, de l'utilisation et du contrôle du matériel, dans la mesure où cela est raisonnablement possible. Comme pour la responsabilité civile, les actes des grimpeurs/euses doivent également être pris en compte.
E. Appréciation
Un comportement pénalement répréhensible des grimpeurs/euses, des professeur-e-s d'escalade, des organisateurs ou des propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage doit être constitutif d'une infraction, illégal et fautif. Dans le cas des accidents d'escalade, les faits constitutifs de lésions corporelles ou d'homicide par dol éventuel ou par négligence entrent notamment en ligne de compte. En ce qui concerne l'illicéité, il faut notamment considérer le consentement des grimpeurs/euses, car ceux-ci acceptent, par la pratique de l'escalade, le risque de blessure inhérent au sport.
Comme dans le droit civil, l'action à ses propres risques et périls, la responsabilité personnelle des grimpeurs/euses est donc un aspect essentiel du droit pénal. Les manquements graves aux obligations des partenaires d'escalade, des professeur-e-s d'escalade, des organisateurs ou des propriétaires d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage sont clairement concernés par le droit pénal. Parallèlement, le fait que les grimpeurs/euses s'engagent dans la voie d'escalade ou la via ferrata constitue un motif de justification ou du moins une réduction de la faute de la part de l'auteur.
V. Droit des assurances sociales
La couverture des assurances sociales en cas d'accident d'escalade est régulièrement négligée, car un accident n'est probablement ni prévu ni bienvenu. Nous aborderons ci-après de manière générale les motifs de réduction et de refus de prestations.
A. Réduction et refus de prestations
L'assurance-accidents peut procéder à des réductions de prestations, voire refuser les prestations, lorsque l'assuré-e- a commis une entreprise téméraire (art. 39 LAA). Les entreprises téméraires sont comprises comme des actes par lesquels les assuré-e-s s'exposent à un danger particulièrement grand sans prendre ou pouvoir prendre les mesures qui ramènent le risque à des proportions raisonnables (art. 50 al. 2 OLAA). Le sens profond des normes juridiques mentionnées réside dans le fait qu'il faut procéder à une pesée des intérêts entre l'intérêt général des assuré-e-s (les payeurs de primes) et la mesure digne de protection d'une activité (p. ex. un sport ; à ce sujet, BSK-Brunner/Vollenweider, Art. 39 UVG N 8).
Une distinction est faite entre les entreprises téméraires absolues et les entreprises téméraires relatives. Dans le cas d'un accident d'escalade, il conviendra d'examiner au cas par cas si, d'après les capacités personnelles et le mode d'exécution, il aurait été possible de réduire le danger et si cela a été omis (pour plus de détails, voir BK-Gehring, art. 39 UVG N 71 ss ; BSK-Brunner/Vollenweider, Art. 39 UVG N 49 ss ; voir aussi Müller, Bergsportkommentar, n. 65 ss.).
Selon le texte de l'art. 50 al. 1 OLAA, il est possible, en cas d'entreprise téméraire, de réduire les prestations de 50% ou de les refuser totalement, cette dernière possibilité supposant une faute particulière ou une gravité particulière du risque (arrêt 8C_683/2010 du 5 novembre 2010).
B. L'escalade en tant que risque
Il n'existe pas de liste exhaustive des entreprises téméraires absolues ou relatives. La commission ad hoc "Sinistres" de la LAA tient une liste des activités qui peut être utilisée comme guide (https://www.svv.ch/sites/default/files/2018-08/83-05-Wagnisse_Anpassung%202018D.pdf). Selon cette liste, l'escalade est considérée comme une entreprise téméraire relative lorsque les règles et les précautions habituelles du sport sont gravement négligées.
La question de savoir si un accident d'escalade entraîne une réduction ou même un refus des prestations dépend en fin de compte de la personnalité de l'assuré-e-, de la manière dont l'acte a été exécuté ainsi que des circonstances dans lesquelles un acte a eu lieu. La dangerosité de l'acte est ensuite évaluée individuellement par rapport à la personne qui agit (BK-Gehring, Art. 39 UVG N 89). Les grimpeurs/euses doivent donc s'attendre à une réduction des prestations de l'assurance-accidents si leur formation, leur préparation, leur expérience/aptitude et leur équipement ne correspondent pas à l'itinéraire choisi et aux conditions attendues (Müller, Kletterausflug, p. 112 s.). Les conditions pour une réduction des prestations doivent toutefois être placées très haut. Dans l'un des rares cas jugés par le Tribunal fédéral, l'existence d'une entreprise téméraire a été niée, bien qu'un accident mortel se soit produit après qu'un des grimpeurs/euses s'est laissé glisser et, pour s'épargner la pénible remontée, a grimpé environ 15 m au-delà du dernier crochet de sécurité (ATF 97 V 72).
VI. Remarques de synthèse
Au cours des dernières décennies, l'escalade est devenue un sport de masse. Les sportifs/ves extrêmes téméraires ne sont plus les seuls à s'aventurer sur les falaises. Des voies d'escalade bien sécurisées, des jardins d'escalade et des via ferrata permettent à un grand nombre de personnes d'escalader des parois rocheuses. Les ambitions, les capacités et les connaissances des grimpeurs/euses sont aussi variées que les voies d'escalade. Que l'escalade puisse entraîner des accidents est un fait. Mais le fait que les tribunaux suisses n'aient que rarement à se pencher sur des questions de responsabilité civile ou pénale dans le domaine de l'escalade montre que le principe fondamental de la responsabilité individuelle est reconnu et vécu. Les grimpeurs/euses, qu'ils soient professionnels ou amateurs, agissent en principe à leurs propres risques et doivent être conscients des risques liés à la pratique de l'escalade.
Le principe de la responsabilité individuelle s'arrête toutefois là où d'autres (partenaire d'escalade, professeur-e-s d'escalade, organisateur, exploitant d'installations d'escalade, tiers) manquent gravement à leur devoir de diligence ou violent la confiance légitime d'autrui. Il faut également tenir compte des canaux d'information actuels. Par rapport au passé, il est aujourd'hui possible d'obtenir des informations sur les voies d'escalade, la qualité du rocher, la rénovation des voies, les évaluations, etc. par le biais de divers canaux. Même si les grimpeurs/euses agissent toujours sous leur propre responsabilité, les informations sur les voies d'escalade et les via ferrata peuvent justifier une confiance légitime. Le devoir de diligence s'applique donc aussi à la mise à disposition d'informations et pas seulement au comportement en falaise. En fin de compte, il faudra toujours clarifier dans chaque cas concret si un devoir de diligence a été ignoré ou si une confiance légitime a été violée et ce qu'il en est de la responsabilité individuelle.
Il ne reste plus qu'à espérer qu'à l'avenir aussi, la responsabilité individuelle sera inscrite en lettres majuscules dans le sport d'escalade, afin que les litiges en matière de responsabilité civile ou pénale ne fassent pas passer le défi sportif au second plan et ne freinent pas l'ouverture, la rénovation et l'entretien des voies d'escalade, des jardins d'escalade et des via ferrata.